La grève des éboueurs continue à Tunis : La ville succombe sous ses ordures
Tunis, submergée par les déchets, va devoir supporter les saletés que lui infligent ses citoyens sous les yeux indifférents des éboueurs grévistes. En attendant que le gouvernement provisoire prenne une décision
durable!
La grève s’est déclenchée après que les éboueurs municipaux aient découvert que les autorités n’allaient pas mettre en application les décisions prises en leur faveur en ce qui concerne la régularisation de leur situation professionnelle.
M. Adel Sagra, du syndicat de base de la municipalité de Tunis, considère que c’est le Premier ministère qui assume toute la responsabilité qui fait que la Ville de Tunis soit depuis plusieurs jours inondée par les ordures à cause de la grève des éboueurs. Il explique au «Quotidien» que «tout a été dans l’ordre avant que les agents ne découvrent que leurs salaires du mois de février n’étaient tout simplement pas réajustés, comme prévu dans l’accord conclu dans ce sens». Vérification faite, le Premier ministère a considéré que les dispositions réglementaires régissant le recrutement des agents de la fonction publique ne permettaient pas la titularisation des agents municipaux, selon l’accord conclu le 15 février dernier. Mieux encore, M. Sagra pense que l’annulation du recrutement est tout simplement liée au changement entrepris le 2 avril dans le poste de directeur des collectivités locales. Il croit que tout a basculé quand on a remplacé le directeur des collectivités locales. Cette décision a fait que l’accord signé avec son prédécesseur n’est point valide: «C’est complètement absurde mais c’est ce qui s’est passé», a-t-il ajouté. Notre interlocuteur considère qu’à l’égard de cette volte-face «les agents vont poursuivre leur grève jusqu’à ce que l’on reconnaisse leur droit à la titularisation».
Le dénouement de cette situation ne se profile pas encore à l’horizon. M. Sagra, qui n’affiche pas beaucoup d’optimisme, s’attend toutefois à ce que le nouveau décret-loi qui doit en principe être annoncé aujourd’hui (NDR : hier) apporte la solution, «comme on nous a promis». Le décret en question doit comporter les modifications nécessaires à même de rendre possible le recrutement des agents temporaires selon la loi régissant la fonction publique. «Nous allons donner l’ordre aux agents municipaux pour interrompre la grève une fois nous obtiendrons l’assurance des autorités», affirme-t-il. L’adoption par le gouvernement dudit décret après sa promulgation par le Président de la République par intérim doit avoir lieu lors du Conseil des ministres prévu le vendredi prochain (15 avril 2011).
Il convient toutefois de rappeler qu’à l’issue de la réunion ayant lieu le 15 février dernier à la direction générale des collectivités locales (ministère de l’Intérieur) il a été en effet décidé de titulariser les 3400 agents temporaires travaillant à la municipalité de Tunis. La décision devrait entrer en vigueur à compter du 1er février 2011 avec tout ce que cela impose en ce qui concerne la révision des salaires et l’application de l’effet rétroactif dès la même date.
La décision concerne en fait l’ensemble des agents municipaux temporaires opérant dans les 264 municipalités du pays. Le procès-verbal de la réunion du 15 février stipule que pour appliquer les mesures entreprises en faveur de ses 3400 agents, la municipalité de Tunis serait appelée à mobiliser les ressources financières nécessaires. Seule une révision intégrale du budget et l’annulation des dépenses inutiles permettrait aux municipalités de relever ce défi.
Hassan GHEDIRI
L’accord du 25 janvier
La grève des éboueurs qui dure depuis plus d’une semaine rappelle celle observée au lendemain du 14 janvier, quand la capitale s’est tristement transformée en un dépotoir à ciel ouvert. Cette première grève était annulée suite à un accord conclu par le syndicat et la municipalité de Tunis, annonçant la titularisation de 3201 ouvriers temporaires. Entrant en vigueur à compter du 1er février 2011, la régularisation de la situation concerne les employés intérimaires en exercice depuis l’année 2000 et jusqu’à 2010, ceux qui travaillent depuis 2006 à travers des contrats à durée déterminée (CDD) ainsi que 151 autres ouvriers licenciés au cours des dernières années.
Les justifications du Premier ministère
Dans sa correspondance adressée le 2 avril 2011, au maire de Tunis, le Premier ministre précise que «les mesures juridiques et réglementaires en vigueur ne permettent pas le recrutement des agents contractuels et temporaires», soulignant que lors de la régularisation de la situation de ces agents, il est proposé de «recruter les ouvriers et les agents contractuels qui ont une ancienneté de plus d’un an dans le grade qui correspond à leur catégorie tout en respectant les conditions législatives et réglementaires en vigueur notamment celles se rapportant à l’âge. Le Premier ministère propose également que les ouvriers et les agents temporaires qui sont en exercice soient recrutés par contrats selon les dispositions en vigueur.